Le choix d’un dosage protéique : Comparaison des 2 méthodes majeures, Coomassie et BCA

 
Le choix d’un dosage protéique au laboratoire, et plus particulièrement en R&D, se ramène le plus souvent à 2 types de test colorimétrique :

  • Les méthodes qui utilisent un colorant que se fixe sur les protéines en changeant de couleur, dont la tête-de-file typique est la méthode au bleu de Coomassie développée par Bradford (1951)
  • Les méthodes mettant en œuvre la réduction de l’ion Cu(II) par les liaisons peptidiques des protéines, dont la tête-de-file est la méthode à l’acide bicinchoninique, plus connue sous l’acronyme BCA (Paul Smith, 1985).

Cet article rappelle les avantages respectifs de ces 2 méthodes majeures, Coomassie et BCA, qui présentent généralement les meilleures performances globales (sensibilité de détection et gamme d’utilisation, compatibilité avec les substances non protéiques dans l’échantillon, praticité et coût,…) pour la plupart des applications.

Adopter l’une ou l’autre méthode sur des critères d’habitude ou disponibilité au laboratoire, mène à en méconnaitre les inconvénients (notamment pour le Coomassie), l’intérêt à adapter la mise en oeuvre, ou enfin les avantages propres aux autres méthodes, apparentées ou non, pour des applications qu’elles soient de routine ou plus spécifiques.

Critères et choix de première intention

Le tableau suivant résume les critères ou caractéristiques majeures et les indications principales pour les 2 méthodes :

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[A] Praticité

Le dosage de protéines au Coomassie est réputé très rapide et simple (“1min à TA”), mais en contrepartie de cet avantage, on peut constater une variabilité des résultats.
Par exemple, il est moins reproductible pour diverses raisons, liées à sa composition colloïdale et à son apparente flexibilité en temps d’incubation .

La méthode BCA est, elle, vue comme moins pratique à mettre en œuvre (2 réactifs, incubation à température contrôlée et plus longue).
La notice technique 40840n précise ces limitations éventuelles et explique comment elles peuvent parfois être réduites voire mises à profit: BCA incubé à température ambiante ou en temps réduit; sensibilité accrue.

In fine, le BCA présente une reproductibilité entre analyses 2 fois inférieure au Coomassie (CV 10-15% contre 30%).

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[Fig.1 ] Courbe standard (BSA) du dosage au Coomassie/Bradford (en haut), et du dosage par le BCA (en bas).

Contrairement au dosage BCA très linéaire (R>0.995), la courbe d’un standard en dosage Coomassie, notamment avec une régression linéaire (orange) produit une imprécision de la détermination de la concentration protéique à partir de l’absorbance d’un échantillon (marron).
Ceci vaut aussi avec un protocole ajusté/gamme de concentration moins large.

[B] Sensibilité et gamme dynamique

La faible linéarité propre au dosage des protéines par le Coomassie (fig.1), très souvent mésestimée, retentit sur la précision des résultats. Elle oblige d’ailleurs à recourir à plusieurs protocoles, en faisant varier le ratio échantillon/réactif, voire à plusieurs réactifs.
La méthode de calcul du résultat importe grandement (une régression courbe étant à privilégier).
Il reste que la comparaison des résultats d’analyse de différentes dilutions d’un même échantillon fait apparaître souvent la limite de précision du dosage (résultats assez différents menant à privilégier une dilution donnant une valeur en milieu de gamme standard).

Le BCA limite ces soucis en offrant une gamme de détection dynamique plus large, avec surtout un signal bien plus linéaire (proportionnel à la concentration): un seul protocole donne une excellente linéarité de 0.5 à 200µg/ml (réactif UP75860A – contre 0.5-20 en Coomassie) ou 20-1500mg/ml (réactif UP40840A – contre 20-250 ou 100-1000).

Les résultats peuvent ainsi être exploités par simple régression linéaire (ou régression courbe, ou manuellement), et pour des échantillons très variables, lors d’une même analyse selon le même protocole, sur la même courbe standard. 
Pour plus d’informations, vous pouvez consulter la notice technique 40840n.

[c]Variations “P à P”

Le dosage par le colorant Coomassie, comme l’amido black ou le ponceau, opère par une fixation de nature ionique et hydrophobe du colorant sur les protéines, qui modifie sa couleur. La détection dépend dont intrinsèquement de la nature de la (des) protéine(s) à doser par rapport à celle servant de standard. Les protéines riches ou pauvres en Arginine (mais aussi His, Lys et aa aromatiques) seront alors sur- ou sous-estimées. On peut ainsi mesurer 30-40% de différence, et même, par rapport à la BSA, 50% pour l’ovalbumine et jusqu’à 60% pour un inhibiteur Trypsique.

Le dosage au BCA produit une première coloration représentative de toutes les protéines, par réaction chimique colorée du Biuret, sur les liaisons peptidiques des protéines. Même si le renforcement de la coloration du complexe reste affecté par la nature des aminoacides (la cysteine ou cystine, tyrosine, et tryptophane y participent), le BCA présente bien moins de variabilité du signal selon les protéines que le Coomassie, et 3 à 4 fois moins que le Lowry, outre qu’il est plus sensible (couleur plus intense, plus soluble). C’est essentiel pour la précision du dosage par rapport à un standard, et pour la fiabilité de mesure des protéines hétérogènes ou particulières comme des protéines membranaires, ou des mélanges complexes (extraits cellulaires). Le BCA permet même de doser des peptides que le Coomassie ne peut pas du tout détecter, avec une sensibilité cependant réduite. Le BCA dose enfin bien mieux les protéines immobilisées sur un support.  
Pour plus d’informations, vous pouvez consulter la notice technique 40840n. 

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[Fig.2]: Principe chimique du dosage des protéines par le Coomassie (fixation)[à gauche*] et par le BCA (reaction chimique) [à droite]. *:Source: in Protocol Exchange (2009), doi:10.1038/nprot.2009.214

[D] Compatibilités / interférences

Le dosage au Coomassie est sensible à divers composés apolaires et ioniques, détergents et dénaturants, les ac.nucléiques et les lipides.
Le BCA est lui sensible, dans sa version de base, à la plupart des chélatants du Cuivre et réducteurs, ce qui peut d’ailleurs être mis a profit pour doser par exemple des sucres réducteurs.

Les autres méthodes ne résolvent pas mieux (et même moins bien) l’équation entre sensibilité de détection, spécificité des protéines, tolérance, praticité et coût.

Pour les échantillons contenant notamment à la fois des détergents et des réducteurs à forte concentration, sans sacrifier la performance en sensibilité et spécificité de détection, il faut combiner des stratégies neutralisant ou éliminant les interférents.

Il est conseillé de :

– sélectionner la méthode de dosage présentant la meilleure compatibilité avec les composés non protéiques de l’échantillon, à commencer par celles du BCA (tableau) ou si besoin du Coomassie (tableau).

-si des composés interférent, les éliminer: la méthode PPR est probablement la solution la plus simple, rapide, flexible et efficace (applicable à quasi tous les interférents avec un bon rendement).

Le PPR, en <10minutes, résout les interférences les plus gênantes au laboratoire, comme les aa Tyrosine, cysteine, tryptophane, glycine, mais aussi l’imidazole, le Tris, les réducteurs DTT, bME, le sulfate d’ammonium, les tanins d’extraits végétaux….

En savoir plus :

  • Plus d’informations sur les sujets suivants sont disponibles sur demande, n’hésitez pas à nous contacter

– les produits BC Assay # UP40840A, le CooAssay #UPF86400 et leur version “No-Interference” incluant le réactif PPR #R5594A, et sur son applicabilité à votre application particulière,
– les autres méthodes de dosage protéiques disponibles: avec lecture à d’autres couleurs (450, 660nm, 750nm), à signal fini, plus adaptées pour les micro-échantillons, la récupération des protéines après dosage, le dosage de peptides et leur clivage ou digestion, et les dosages de protéines par fluorescence (plus sensibles).